Théâtres de vies

Marie Laure Gérard Bécuwe sculpte, mais elle pourrait être conteuse. Son monde est fait d’histoires simples, de paroles qu’on se transmet comme se transmettent les contes, ce qui donne une dimension orale à sa sculpture. Des mots, écrits au fil de fer, s’invitent parfois dans la plastique de sa sculpture pour en suggérer le nom.

Dans un premier temps, elle travaille la forme, des structures en acier, des ronds, des carrés ou bien des rectangles superposés les uns aux autres comme une mise en situation, une scénographie pour accueillir sesacteurs. Ces formes vides sont des théâtres de poche, des lieux où vont se jouer des histoires qui resteront figées dans le temps.

Les acteurs, eux, sont déjà dans les coulisses. Elle sculpte, à la cire perdue, des petits personnages qu’unfondeur, par la suite, réalisera en bronze. Ce petit peuple vient de ses observations, de son imagination, de ses voyages ou de sa vie de tous les jours. Ils courent, réfléchissent, attendent, chutent, parlent, rêvent…sans oublier le petit chien qui accompagne toujours son maître.

Et l’assemblage commence. Elle installe chacun de ses acteurs dans les structures en acier selon l’histoire qu’elle souhaite nous raconter.

La narration est partie prenante de son oeuvre. Les titres donnent le ton, guident notre imagination. Àchacun de s’approprier l’histoire avec délectation, car il y a du plaisir dans son travail. Même si certains titres réveillent de sombres émotions, ce qu’elle nous transmet n’est jamais sans issue.

La vie circule entre chaque saynète. Une fenêtre poétique guide notre regard et l’on s’envole.

L’oeuvre est alors aboutie. Les grands formats font penser à des moucharabiehs ou des claustras et lesombres portées des personnages sur un mur blanc en donnent une autre lecture.

Ses sculptures nous accompagnent, sollicitent notre vécu, parlent pour nous, rapprochent des mondes qui se seraient éloignés, expliquent qu’il n’est pas si difficile de communiquer les uns avec les autres, qu’il n’est pas si compliqué d’aimer.

Le temps s’arrête, la poésie s’installe, le rêveur est comblé. Bienvenue dans ce théâtre de vies!